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Pratique
| | 30/04/2025

Plateformes alternatives : futur porte-étendard de l'économie collaborative ?

© CCO / Flo­rence Phi­lip­part

L’éco­no­mie col­la­bo­ra­tive, per­çue dans les an­nées 2000 comme une ré­ponse éco­no­mique, so­ciale et en­vi­ron­ne­men­tale, est au­jour­d’hui contro­ver­sée. Les pla­te­formes pion­nières, de­ve­nues ca­pi­ta­listes, se sont im­po­sées ra­pi­de­ment sur les mar­chés. Dans l’ombre, des mo­dèles al­ter­na­tifs tentent de se dé­ve­lop­per. Éclai­rage sur cette évo­lu­tion par Ca­the­rine L’Ecuyer, pro­fes­seur as­so­ciée à MBS School of Bu­si­ness.

La pro­po­si­tion de va­leur d’une pla­te­forme di­gi­tale d’éco­no­mie col­la­bo­ra­tive est de mettre en re­la­tion four­nis­seurs et clients pour ac­cé­der à – et non pos­sé­der – des biens sous-ex­ploi­tés (pro­messe en­vi­ronne­men­tale), gra­tui­te­ment ou non (promesse éco­no­mique), pour une pé­riode dé­ter­mi­née, entre pairs (pro­messe sociale). L’hé­ber­ge­ment tou­ris­tique et la mo­bi­lité sont les fers de lance de cette éco­no­mie dont le prin­cipe est d’at­ti­rer ra­pi­de­ment des uti­li­sa­teurs via des straté­gies d’ef­fets de ré­seau. En Oc­ci­ta­nie, plu­sieurs pla­te­formes alter­na­tives sont por­tées par des en­trepreneurs aux lo­giques d’en­ga­ge­ment sociale­ment du­rable, fé­dé­rant leur com­mu­nauté au­tour de va­leurs par­ta­gées. Dans l’hé­ber­ge­ment tou­ris­tique, trois d’entre elles concur­rencent Airbnb : Bedy­casa, po­si­tion­née comme une so­lu­tion éthique ; FairBnB, qui re­verse une part de ses re­ve­nus à des pro­jets lo­caux ; Les Oi­seaux de Pas­sage, qui va­lo­rise l’enrichis­se­ment cultu­rel et les ré­cits lo­caux.

At­ti­rer, convaincre et fi­dé­li­ser
L’en­jeu cen­tral est d’at­ti­rer, de convaincre et de fi­dé­li­ser. Les géants de l’éco­no­mie col­la­bo­ra­tive l’ont com­pris très tôt en déve­lop­pant des stra­té­gies re­la­tion­nelles ef­fi­caces (Le­cuyer, Ma­rais et Gurau, 2023). La pre­mière pla­te­forme de cette éco­no­mie est fran­çaise. Fon­dée en 2006, Bla­bla­car pro­pose le co­voi­tu­rage : op­ti­mi­sa­tion des sièges in­oc­cu­pés (en­vi­ron­ne­ment), par­tage des frais (éco­no­mie) et ren­contres entre pas­sa­gers (so­cial). En 2008, Airbnb promeut un hé­ber­ge­ment pour « vivre comme un local ». En 2009, Uber s’au­to­pro­clame ac­teur de cette éco­no­mie en sup­pléant le taxi par le vé­hi­cule de tou­risme avec chauffeur grâce à la géo­lo­ca­li­sa­tion et un temps d’at­tente ré­duit. Les le­vées de fonds succes­sives des pion­niers de la Si­li­con Val­ley ont fa­vo­risé l’in­no­va­tion pour op­ti­mi­ser l’ex­pé­rience uti­li­sa­teur. Une fois la taille cri­tique at­teinte, ces pla­te­formes sont en­trées en bourse pour sa­tis­faire leurs in­ves­tis­seurs. La lo­gique des di­vi­dendes pré­vaut. Nos études sur Airbnb, à New York puis à Paris, ont confirmé trois dyna­miques re­la­tion­nelles : la do­mi­na­tion exer­cée par la pla­te­forme qui contin­gente son éco­sys­tème tout en rap­pe­lant qu’elle pro­meut l’au­to­no­mie (flexi­bi­lité des horaires) et la ré­ci­pro­cité mu­tuelle (rôle so­cial). Mal­gré son agi­lité, la pla­te­forme est contes­tée par des ten­sions aug­men­tant ses coûts tran­sac­tion­nels (li­tiges, contraintes ré­gle­men­taires) et fra­gi­li­sant ses mar­chés clés. Nous sou­te­nons que les pla­te­formes al­ter­na­tives, déjà en­ga­gées avec les com­mu­nau­tés lo­cales, peuvent de­ve­nir les nou­veaux porte-éten­dards de l’éco­no­mie col­la­bo­ra­tive. Leur ave­nir repose sur des stra­té­gies de ré­seau ci­blées et leur at­trac­ti­vité au­près des in­ves­tis­seurs et fonds à im­pact.

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