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| 27/06/2017

Métropole de Montpellier : 7 vice-présidents destitués le 5/7

Porté par la vague Macron, qu’il a soutenu lors de la campagne présidentielle, Philippe Saurel, maire DVG de Montpellier et président de Montpellier Méditerranée Métropole, crée un groupe « En marche et apparentés » et fait de l’appartenance à ce groupe une condition pour qu’un élu puisse garder sa vice-présidence à la Métropole.

Conséquence, 7 vice-présidents (sur 20), qui ont rallié Saurel en 2014 mais refusent de rentrer dans ce qu’ils appellent un « diktat », vont sauter dans les prochains jours, d’après nos informations. Soit un tiers de l’exécutif métropolitain.

Les sept vice-présidents « démissionnés » : René Revol (maire de Grabels ; Délégation à la Métropole : politique de l’eau et milieux aquatiques), Pierre Bonnal (maire du Crès ; Délégué aux ressources humaines), Catherine Dardé (1ère adjointe au maire de Castelnau-le-Lez ; Déléguée à la Politique de la Ville), Isabelle Touzard (maire de Murviel-lès-Montpellier ; Déléguée à l’emploi, aux TPE-PME, à l’artisanat et à l’agriculture), Cyril Meunier (maire de Lattes ; Délégué à l’environnement), Jean-François Audrin (maire de Saint-Georges-d’Orques ; Délégué à la biodiversité) et Michelle Cassar (maire de Pignan ; Déléguée à la sécurité).

Ces élus ne devraient majoritairement pas démissionner d’eux-mêmes (seul Jean-François Audrin a annoncé sa démission, hier), pour forcer le conseil à les écarter, lors d’un vote à bulletin secret, devant les médias. Le débat et le vote se dérouleront lors d’un conseil métropolitain extraordinaire, le mercredi 5/7 à 15h. Le conseil métropolitain de ce mercredi 28/6 s’annonce, dans ce contexte, explosif.

Revol et Meunier dénoncent une politisation de l’institution métropolitaine

Dans un point presse organisé ce mardi matin, en salle du conseil municipal à Lattes, Cyril Meunier s’est dit surpris par la forme employée. « C’est Christian Fina, le directeur général des services, qui m’a appelé lundi matin. Il m’a dit : ‘soit tu rentres dans le groupe En Marche et Apparentés, tout en quittant ton poste de conseiller départemental, et tu restes vice-président ; Soit on te retire ta délégation. Cette façon de présenter les choses fermait la porte à toute acceptation de ma part d’adhérer au groupe majoritaire nouvellement créé. C’était une façon de dire : ‘on ne veut pas de toi’. On me sort comme un malpropre (sic). »
René Revol, maire de Grabels, d’ajouter : « Christian Fina, en tant que DGS, est le garant de la neutralité de l’institution. Il n’a pas de fonction de cabinet. Ce n’est pas à lui de composer les majorités politiques. »

Sur le fond, Cyril Meunier a insisté sur le caractère non partisan de l’intercommunalité. « J’ai été élu en 2001, dans un climat lourdement politique. Le District (ex-Métropole et ex-Agglomération, NDLR) était alors bloqué, du fait de luttes intestines entre mon prédécesseur à la mairie de Lattes et Georges Frêche, alors président du District. Avec des conséquences très concrètes pour Lattes : une usine d’assainissement pas rénovée, une décharge à ciel ouvert, un risque inondation pas traité… » Aujourd’hui en charge d’une délégation, à la Métropole, « dont beaucoup ne voulait pas » (déchets, inondations, gestion des eaux usées), il regrette une « politisation de l’action publique à travers cette volonté de Philippe Saurel de conditionner une vice-présidence au ralliement à un mouvement. Or, la Métropole est une intercommunalité de gestion, au sens noble du terme, et ne doit pas avoir de dimension politicienne ».
Il annonce ne pas souhaiter démissionner. « Je perdrai mon poste par la volonté de mes pairs, plutôt que de démissionner sur un diktat. Ce n’est pas un psychodrame. Je quitterai cependant cette délégation la mort dans l’âme, m’y étant engagé personnellement . J’ai réglé les problèmes de collectes des ordures, avec une économie de plusieurs M€, j’ai remis en marche l’usine de méthanisation Amétyst. Je suis persuadé de ne pas avoir fauté dans les missions qui m’ont été confiées. On ne me retire pas ma délégation pour défaut technique. »
Cyril Meunier se dit « à l’opposé de l’incompatibilité macroniste. Ce n’est pas l’orientation politique du groupe de Saurel qui me bloque. C’est l’attachement à l’esprit intercommunal non partisan qui m’empêche d’adhérer au groupe En marche et apparentés. Le fait qu’un seul groupe politique concentre l’ensemble des vice-présidences est une faute, un non-respect de l’esprit de la Métropole. La politisation de l’assemblée n’est pas une clef de réussite pour notre territoire. »
Il alerte sur le danger, pour la Métropole, de n’avoir aucun vice-président « ni de Lattes, ni de Castelnau-le-Lez, les 2ème et 3ème villes de la Métropole, concentrant de forts enjeux : transports, zones d’activités, risque inondation, urbanisme… »
Cyril Meunier avertit enfin son successeur(e). « Il ou elle aura à se faire rapidement à la vice-présidence. Si cette personne a besoin de moi, je donnerai des conseils, je jouerai l’intérêt général. Il va falloir y aller. Pendant six mois, j’ai eu une remise à niveau costaude. »

Même discours chez René Revol, joint mardi après-midi par La Lettre M : « Cette proposition exprimée lundi par Philippe Saurel brise la façon de fonctionner des intercommunalités. Faire des groupes politiques est, bien sûr, un droit. Mais conditionner la gestion de l ‘intercommunalité à l’appartenance à un groupe politique créé en milieu de mandat, c’est ahurissant. Je ne comprends pas. C’est une remise en cause de l’engagement pris devant les électeurs en 2014, autant par M.Saurel avec sa liste citoyenne à Montpellier que moi à Grabels. Je n’instrumentalise pas ma ville et ma municipalité, et l’argent public, pour une cause politique partisane. Je ne ferai pas de groupe FI (son parti, NDLR) à la Métropole : ce serait ridicule. Lorsque j’ai envie de défendre mes opinions politiques partisanes, je vais à des élections politiques nationales ou régionales sous mon étiquette. Par contre, pour ma commune, c’est un engagement non partisan, que je défends à la Métropole. J’étais heureux que Philippe Saurel ait la même attitude en 2014. »
Comme Cyril Meunier, il part avec le sentiment du devoir accompli : régie de l’eau, baisse du prix de l’eau, multiplication par trois des investissements, mise en place d’un observatoire de l’eau… « J’ai rempli mon mandat. Ai-je mal fait mon travail ? Non. On m’expulse pour des raisons politiciennes. Je ne démissionnerai pas. C’est lui qui rompt le contrat. A l’assemblée de voter. »

« La méthode de Philippe Saurel est surprenante et un peu brusque. Il y a d’autres moyens de solliciter les gens », déclare de son côté Isabelle Guiraud, maire de Saint-Jean-de-Védas (ex-LR ; délégation à la Métropole : administration générale, contentieux et affaires juridiques). Elle se dit néanmoins « macron-compatible » et doit débattre de son ralliement au groupe « En Marche et apparentés » avec sa majorité municipale, ce mardi soir.

Eliane Lloret, maire de Sussargues et vice-présidente déléguée à l’énergie et à la transition énergétique, sans étiquette, ne cache pas, mardi matin, en marge d’une signature avec GRDF, son « malaise », même si elle a décidé de continuer aux côtés de Philippe Saurel. « Quand on voit le travail qui a été réalisé depuis 3 ans, avec des orientations politiques différentes… Je regrette qu’on en arrive là », confie-t-elle.

Quel intérêt pour Philippe Saurel ?
Pour René Revol, « Saurel fait un calcul politique. Il veut profiter de la vague Macron pour se représenter en 2020 aux municipales à Montpellier. Même si peu, dans sa majorité, sont réellement En marche. Ça sera plutôt un groupe d’apparentés. »
Autre interprétation : « Saurel ne supporte pas les têtes qui dépassent. Pourtant, j’ai été loyal, malgré des points de divergence majeurs : passage en métropole et gare de La Mogère. Maintenant, je serai libre. Il nous ouvre un boulevard (rires). »
Tactiquement, « Saurel fait une erreur, analyse Revol. Il veut fonctionner comme Frêche. Il veut peut-être des vice-présidents qui signent, et une administration qui gère. C’est une erreur : d’abord parce qu’il n’est pas Georges Frêche, et parce qu’on est à une autre époque. »

Hubert Vialatte / vialatte@lalettrem.net
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